Page:Grillet - Les ancêtres du violon et du violoncelle, 1901,T1.djvu/73

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À ces désagréments devait s’en joindre un autre non moins grand ; on ne pouvait utiliser cet instrument, toujours à cause de son chevalet diviseur, pour accompagner une mélodie quelconque, aussi lente soit-elle. La seule chose possible, dans ce cas, était de s’en servir comme d’un diapason, pour donner la première note du ton.

Un autre instrument, plus commode et plus pratique, s’imposait donc pour soutenir la voix, surtout dans les premiers temps du déchant[1], et comme on songea tout d’abord à remplacer le sillet mobile par les doigts, qu’il devenait alors indispensable d’en rendre l’application facile, on ne put conserver la forme du monocorde scolastique, et l’on adopta celle que nous voyons à la lyra, forme qui doit être imitée d’un instrument pincé plus ancien.
monocorde
Manuscrit de Saint-Glaise (ixe siècle).

En y comprenant la note donnée par la corde à vide, la lyra ne produisait que cinq sons différents ; car, à cette époque, la main gauche restait en place, on ne démanchait pas ; du reste, il aurait été impossible de le faire, puisqu’il n’y avait pas de manche et que la caisse allait en s’élargissant depuis le cheviller. Cet instrument, qui paraît n’avoir joué un rôle que dans la musique sacrée, offrait donc de bien modestes ressources, et l’on ne s’expliquerait guère sa présence dans nos orchestres modernes. Toutefois, ses cinq notes devaient suffire pour doubler les anciens plains-chants, dont l’étendue ne dépasse pas un intervalle de quinte ou de sixte au plus, et l’on pouvait à la rigueur faire une sixième note par l’extension du petit doigt de la main gauche.

Mais, aussi modiques que fussent ses moyens, ils étaient

  1. Déchant ou Discant est le terme par lequel on désignait primitivement le contrepoint.