Page:Grillet - Les ancêtres du violon et du violoncelle, 1901,T2.djvu/69

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sans hésiter la partie des Songes funestes d’Athys, que Lully donnait à exécuter, comme épreuve, à ceux qui se présentaient à lui, pour faire partie de son orchestre. Ainsi s’explique le peu de considération accordé au violon à ses débuts.

On pourrait croire qu’il fut maltraité alors parce qu’il continua dans les fêtes le rôle du rebec, avec lequel on l’identifiait ; mais il n’en est rien ! Il est bon joueur de rebec, voulait dire un homme habile ; tandis que : C’est un plaisant violon, ou simplement un violon, était un terme de mépris : « Traiter un homme de violon, c’est comme si on le mettoit au rang des ménétriers qui vont de cabaret en cabaret jouer du violon et augmenter la joie des ivrognes », se lit aussi dans le Dictionnaire de Trévoux. Castil Blaze doit donc avoir raison, lorsqu’il dit :

« Le luth, la viole, le téorbe, le clavecin étaient les instruments favoris des amateurs peu nombreux qui cultivaient la musique. Un fashionable aurait rougi si on l’avait surpris un violon à la main ; c’était l’instrument du ménétrier, du maître à danser ; et si quelques amateurs jouaient du violon, c’était pour leur usage particulier ; ils n’osaient pas toujours avouer ce travers[1]. »

M. Arthur Pougin, a publié dans Le Ménestrel une étude intéressante où il fait connaître les noms de quelques joueurs de violon que l’on doit considérer comme étant les élèves de Lully[2]. Ce sont : Lalouette et Colasse, qui furent chefs d’orchestre, ou plutôt batteurs de mesure, sous ses ordres ; Joubert, puis, Jean-Baptiste Marchand, à la fois joueur de luth (luthérien, comme on disait alors), de la Chambre du roi, et dessus de violon à la Chapelle ; Rebel père, lequel habitait, en 1667, rue Froidmanteau, et qui est probablement le chef de la dynastie des Rebel ; et La Lande,

  1. Castin-Blaze. Chapelle-musique des rois de France, p. 88
  2. L’Orchestre de Lully, par Arthur Pougin. Le Ménestrel, février et mars 1896.