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montagne craqua avec force et se sépara. Aussitôt le premier s’approcha de la fente, regarda au-dessus de sa tête et vit l’azur du ciel ; et, comme il se réjouissait de revoir la lumière du jour, il tomba à l’instant roide mort. La montagne continua à se séparer et la crevasse à s’élargir ; et les deux autres mineurs, travaillant, piochant toujours, taillèrent des escaliers, se traînèrent en rampant vers l’ouverture, et enfin se virent dehors. Ils se rendirent à leur village, dans leurs maisons, et cherchèrent leurs femmes ; mais celles-ci ne voulurent pas les reconnaître. « Eh quoi ! leur dirent-ils, n’avez-vous jamais eu de maris ? — Si, répondirent-elles ; mais, depuis sept ans, nos maris sont morts et enterrés dans le Kuttenberg. » Le second dit à sa femme : « Je suis ton mari. » Mais elle ne voulut pas le croire, parce qu’il avait une barbe longue d’une aune, qui le rendait entièrement méconnaissable. Alors il lui dit : « Porte-moi mon rasoir, qui est là-haut dans l’armoire du mur, et, de plus, un petit morceau de savon. » Il se rasa, se peigna, se débarbouilla, et, quand sa toilette fut achevée, elle vit que c’était bien son mari. Elle s’en réjouit sincèrement, servit tout ce qu’elle avait de meilleur à manger et à boire, mit le couvert sur la table, puis ils s’assirent et mangèrent