Page:Groulx - L'appel de la race, 1923.djvu/13

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
13
LE COIN S’INTRODUIT

collège. Il avait dix ans lorsqu’il prit la route du Séminaire de X… D’intelligence précoce mais solide, l’enfant y fit de bonnes études. Une seule chose lui manqua affreusement : l’éducation du patriotisme. Ainsi le voulait, hélas ! l’atmosphère alors régnante dans la province française du Québec.

Se peut-il mystère plus troublant pour l’historien de l’avenir, que la période de léthargie vécue par la race canadienne-française, pendant les trente dernières années du dix-neuvième siècle ? Rien n’illustre mieux l’influence rapide et fatale d’une doctrine sur un peuple, cette doctrine eut-elle à dissoudre, pour régner, les instincts ataviques les plus vigoureux. Comment, en effet, la vigilance combative du petit peuple de Québec, développée par deux siècles de luttes, avait-elle pu soudainement se muer en un goût morbide du repos ? Quelques discours, quelques palabres de politiques y avaient suffi. Pour faire aboutir leur projet de fédération, les hommes de 1867 avaient présenté le pacte fédératif, comme la panacée des malaises politiques. Hommes de parti et pour emporter coûte que coûte ce qui était le projet d’un parti, ils usèrent et abusèrent de l’argument. La fausse sécurité développée, propagée par ces discours imprudents produisit en peu de temps une génération de pacifistes. Un état d’âme étrange se manifesta tout de suite. Ce fut l’énervement subit de tous les ressorts de l’âme nationale, de tous les muscles de la conscience : la détente du chevalier qui a trop long-