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PRÉPARATIFS DE BATAILLE

agitateur français ». Et moi, je sens, et je vous en avertis loyalement, Jules, je sens que si vous alliez devenir le chef public, reconnu de cette agitation, trop de malaise, trop de motifs de désunion se glisseraient entre nous pour que la vie ici me fût tolérable.

Elle s’arrêta sur ces mots qui sortirent péniblement de sa gorge, consternée par l’effet qu’ils venaient de produire sur son mari. Lui, l’avait écoutée jusque-là, penché en avant, les mains jointes, dans une attitude d’abandon. Il se redressa soudain ; sa figure prit cette fermeté rigide qui annonçait chez lui ie sentiment intérieur blessé, la volonté de défendre sa résolution. Maud eut peur d’avoir tout compromis. À son tour, elle prit la main de son mari, et, retrouvant ses accents de tendresse, elle lui dit en cherchant ses yeux :

— Jules, dites-moi que votre devoir ne vous commandera pas de me faire mourir ? Elle attendit la réponse. Les traits de Jules se détendirent de nouveau. Il fut reconquis par ce retour d’amour suppliant. Il joignit sa main restée libre à celles de Maud et les pressant affectueusement il répondit :

— Vous savez-bien que je n’aurai pas cette cruauté.