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mes mémoires

Père Lacordaire par Chocarne. Rien ne m’a échappé de ce que l’on a alors publié sur Ozanam. Et comme j’ai cherché une Vie du Christ, vie attrayante, vie révélatrice, à mettre entre les mains de mes jeunes gens ! Ainsi qu’on peut le voir, nous n’étions pas de grands psychiatres, ni même des psychologues. Au vrai, ceux de ces messieurs qu’il m’a été donné d’entendre depuis ce temps-là à la radio ou à la télévision, dissertant d’éducation, m’ont quelque peu consolé sur ma jeune misère, tant ils m’ont paru d’une pauvreté intellectuelle à faire pleurer. Psychologues sans vraie philosophie ni psychologie, et par surcroît, dépourvus de sens chrétien, ignorant tout de la si pénétrante psychologie des grands maîtres de la spiritualité catholique. Non, nous n’étions que d’humbles éducateurs qui prenaient leurs inspirations dans la théologie, dans l’Évangile et dans la spiritualité traditionnelle. C’est pour avoir observé l’influence de ces exemples ou de ces vies de grands apôtres sur moi-même que j’en suis venu à proposer à mes dirigés, avec tant d’insistance, tout en les adaptant à chacun, les mêmes lectures, les mêmes relations. J’ai aussi étudié quelques ouvrages de spécialistes : ceux du pédagogue suisse Fœrster, L’âme de l’adolescent de Mendousse : œuvres malheureusement rares à cette époque.

Une Croisade d’adolescents

En cette période de 1903-1906 s’intercale encore la phase active de la Croisade d’adolescents. Pour mieux connaître cette œuvre de petits collégiens, l’on voudra lire la deuxième édition d’Une Croisade d’adolescents, parue chez Granger en 1938. La première est illisible. Je ne sais comment j’ai été amené à l’écrire en ce style. Alors même j’écrivais pourtant d’une autre manière. Surmené, presque constamment à bout de forces, en trop forte tension nerveuse, mon état physique a trop influencé ma façon d’écrire. Il faut dire que la première ébauche du petit livre fut écrite à Fribourg (Suisse), dans une chambre de malade où je luttais contre une grave maladie qui mettait même mes jours en danger. La Croisade a débuté en 1901, petitement, puis vivoté, même après mon retour du Grand Séminaire en 1902. Elle reprend vie, perfectionne sa formule, sa méthode d’action après