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mes mémoires

un caractère émouvant. Le soir, la salle du Château Laurier s’emplit. L’archevêque, Mgr Forbes, est présent et parle fort opportunément. Il y a là aussi des représentants du monde politique. Je suis voisin d’Armand LaVergne, infirme qui ne se tient debout qu’avec des béquilles. LaVergne parle avec émotion et son esprit coutumier. La mesquinerie ne triomphe pas toujours.

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L’Abitation se vit honorée d’autres visiteurs qui m’ont laissé plus agréable souvenir. Un été, l’abbé Philippe Perrier, dont je suis alors le pensionnaire à son presbytère, vient passer une semaine avec nous. Comme tous les hommes de solide complexion morale, l’air des vacances n’est pas fait pour le changer. Il se montre tel qu’il a été partout, en tout temps : jovial, grave, sérieux, aimant à badiner comme à causer gravement, muni, cela va de soi, de provisions pour lecture. Mon vieil ami de collège, Alfred Langlois, devenu évêque de Valleyfield, après avoir été évêque auxiliaire à Québec, nous fait aussi l’honneur d’une visite. Ce nous est une nouvelle occasion de remuer bien des souvenirs. Et que de problèmes sans doute, nous avons abordés, explorés ! Charmant causeur, mon vieux camarade est aussi de ceux qui savent écouter. Il y a plaisir à brasser avec lui toutes sortes d’idées. Esprit cultivé, sérieux, ouvert, tous les débats l’intéressent. Il écoute avec l’humble attention des hommes qui cherchent la lumière pour agir. Homme des plus estimables, plein de cœur, plein de générosité, à qui il n’aura manqué qu’un peu plus d’assurance et d’esprit de décision pour être un grand homme d’action et un grand évêque.

Un autre jour, en 1932, je pense, nous voyons arriver à l’Abitation, le plus illustre assurément de nos visiteurs, l’ancien