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troisième volume 1920-1928

du monde les choses les plus intéressantes sur les sujets les plus variés. » Longtemps l’Almanach continuera de s’attirer les mêmes éloges. On les peut recueillir en chaque volume de L’Action française. Chaque année, pour répandre la petite brochure, ce que l’on veut bien appeler un « manuel de patriotisme populaire », les amis de l’œuvre dépensent d’infinis dévouements. On organise des concours de vente en certaines écoles. Je vois, par exemple, dans le volume VII de la revue (p. 59), qu’il y eut, cette année-là, à l’Académie Saint-Paul-de-la-Croix, une « Fête de l’Almanach », fête où il s’agit de couronner ou de récompenser les élèves de cette Académie et de l’École Saint-Gabriel, vainqueurs dans un concours de vente. À Saint-Paul-de-la-Croix, il y eut concert. On y joua une saynète tirée des Lendemains de conquête de l’abbé Groulx ; on récita le Quêteux d’Adjutor Rivard ; on chanta diverses chansons patriotiques. Et le tout se termina par un discours du Dr Gauvreau, le dynamique vice-président de la Ligue. Aussi bien lancé, comment l’Almanach en vint-il à cesser de paraître ? Ces sortes d’ouvrages sont de facture plus difficile que d’aucuns le pourraient penser. Pour bâtir un almanach populaire, il faut, à tout le moins, le tour d’esprit populaire. Un almanach doit savoir monnayer une doctrine, prodiguer les images, les illustrations, ne pas se refuser les choses amusantes : contes, caricatures, mots pour rire, etc. Je me souviens, par exemple, qu’en certains quartiers, on reprocha assez gravement à notre Almanach de ne contenir ni horoscope, ni pronostics sur le temps. Et force fut de condescendre à ces respectables désirs, un honnête almanach ne se pouvant concevoir sans ces éléments plus qu’essentiels. En définitive, l’homme nous manqua qui, tout en laissant à l’Almanach de la Langue française, sa stricte originalité de « manuel de patriotisme », lui eût conservé son caractère populaire.

En 1922, le président du Comité d’administration, le Dr Gauvreau, risque une petite enquête parmi nos meilleurs amis :

— Que pensent-ils de l’Almanach ? La réponse est presque un abattage :

Vous restez assez gais… mais il faut l’être davantage.

(Père Louis Lalande, s.j.)

L’Almanach est une littérature trop substantielle pour la masse des lecteurs.

(Père Auclair, du Patriote de l’Ouest)