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XIII

MORT DE L’ABBÉ ALFRED ÉMERY

Puisque nous sommes toujours aux années 1930, un deuil prend ici sa place à la fin de ce volume : deuil qui me sera plus pénible que bien d’autres et qui me ramène à mes jeunes années. Un confrère, un ami de collège m’était resté particulièrement cher. Aux heures de la jeunesse rien ne lie autant que le partage des mêmes rêves, des mêmes idéaux, la même conception de la vie et de l’avenir. Au collège j’eus le bonheur de rencontrer quelques-unes de ces amitiés, de celles qui résistent à l’usure de la vie. L’ami dont je veux rappeler le souvenir, ne m’avait infligé, ni pendant ni après le collège, aucun oubli, aucune brisure. Il nous avait quittés après sa Rhétorique. Il avait opté pour le Grand Séminaire. À titre de diocésain il relevait du siège de London (Ontario). Son évêque lui imposa d’aller faire ses années de philosophie au Collège anglais de Sandwich. Nous nous étions retrouvés en 1899 au Grand Séminaire de Montréal. Pendant quelques mois — c’était la coutume avant l’élimination des indécis — nous avions partagé la même chambre. Puis, j’avais quitté le Séminaire le premier, quelques mois plus tard, pour prendre le chemin de Valleyfield, mon diocèse d’origine, d’où je ne reviendrai qu’après trois ans. Lui, son séminaire terminé, était reparti pour son lointain diocèse. Son amitié ne l’éloigna point de son ancien condisciple ; elle resta vivante. J’en eus un jour la preuve manifeste. Preuve qu’on aura trouvée dans le premier volume de ces Mémoires. À Valleyfield, on se le rappellera, l’on avait fait de moi, encore étudiant en théo-