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IV

MOUVEMENTS DE JEUNESSE

Revenons une fois de plus en arrière. Je décris et raconte et ne l’oublie point, les mouvements d’opinions, surtout dans les milieux de jeunesse, mouvements qui, à mon sujet, vont susciter, entretenir tant d’équivoques et d’illusions. Le grand chômage atteint au vif la jeune génération. Un pays ne traverse point impunément ses régressions économiques. La jeunesse entre dans la vie, piaffante, bruissante d’ambitions. Elle voit devant elle toutes portes fermées. Volontiers s’en prend-elle aux aînés qu’elle tient responsables de ses malheurs. Alors qui s’étonnera qu’en ces dix années 1930-1940 foisonnent les mouvements de jeunesse d’allure plus ou moins révolutionnaire ? On y a le verbe haut, le poing levé, l’anathème en bouche contre les gens en place, les politiciens impuissants. À tout prix l’on veut du changement, du neuf, de l’air pur, et par les fenêtres trouées s’il le faut. Finie la résignation aux inévitables misères. Et l’on cherche les hommes qui se refusent, eux aussi, aux maux immérités de l’époque et qui ne craignent pas de secouer les chaînes. Sans doute, parmi les jeunes révoltés, esprits plus vigoureux, discerne-t-on, malgré tout, la petite tribu des faibles, des résignés, des blasés, déchets de toutes les crises : « génération de vieillards » qu’un étudiant de l’Université Laval, J.-Charles Bonenfant, s’applique à décrire dans le journal Le