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sixième volume 1931-1939

nos routes se sont couvertes de panneaux-réclames rédigés en mauvais anglais. Une campagne se poursuit actuellement pour la refrancisation de la province de Québec. Notre résolution est de la seconder de toutes nos forces.

Cette question de l’industrie et du commerce pose un problème beaucoup plus grave et de plus grande ampleur. Les Canadiens français sont en train de devenir chez eux un vaste peuple de prolétaires. Nous demandons à nos politiques et à nos économistes de redresser cette situation. Nous n’entendons point que l’on se serve des richesses naturelles de notre province pour compromettre ou nous ravir notre patrimoine moral et nous imposer la pire des dictatures. Nous n’entendons point non plus qu’il soit indéfiniment loisible à des capitalistes étrangers, qui exploitent en définitive notre fonds national et la main-d’œuvre canadienne-française, de pratiquer contre nos ingénieurs et nos techniciens un véritable ostracisme et de ne nous réserver, dans la vie économique de notre pays que des rôles de manœuvres et de domestiques.

Nous n’ignorons point que toutes ces revendications exigent de la génération actuelle un grand et généreux effort. La lutte que nous entreprenons sera longue et elle n’aura chance d’aboutir que si elle sait être persévérante. Nous ne serons respectés dans notre province que si nous conquérons la force et la dignité. Notre langue et notre culture ne seront efficacement défendues que si elles s’appuient sur un ensemble de forces, une vie nationale vigoureuse et ordonnée.

Nous faisons donc appel à la jeunesse, à toute la jeunesse de notre race : à la jeunesse universitaire, à la jeunesse des collèges et des écoles, à la jeunesse ouvrière, à la jeunesse agricole, à la jeunesse professionnelle. Que dans tous les domaines de la vie nationale le souci s’éveille, ardent, de reconquérir les positions perdues, de faire meilleur l’avenir. C’est à un vaste labeur : intellectuel, littéraire, artistique, scientifique, économique, national que nous, les jeunes, sommes conviés par les exigences de notre temps. Souvenons-nous que nous ne serons maîtres chez nous que si nous devenons dignes de l’être.

Ce n’étaient pas paroles en l’air. Les Jeune-Canada passent tout de suite à l’action. Ils ne sont que quinze ou vingt. Parmi eux