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Page:Groulx - Mes mémoires tome III, 1972.djvu/324

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sixième volume 1931-1939

Hamel, Charpentier, Guérin, en des études élaborées publiées par l’École sociale populaire, nos 232-233 et 239-240, dégagent et exposent les parties maîtresses du programme. Le succès est spontané. Par cet instinct de conservation qui veut que les vieux partis volent les programmes des plus jeunes, tentent l’absorption des adversaires, le parti conservateur, parti oppositionniste à Québec, adopte d’emblée, lors de sa convention de Sherbrooke, le programme no 2 ; le parti régnant, le parti libéral, y va d’un fleuretage intéressé. Restaient les jeunes groupes en formation. Paul Gouin a participé à la rédaction du programme no 2. Par souci de tactique, a-t-il dit, il s’est abstenu de le signer. Sans tarder l’Action libérale nationale le fait sien. Autour de ce manifeste se jouera le sort des prochaines élections. Enfin, semblait-il, le Québec aurait des élections hors de l’ornière politicienne ; on s’élèverait jusqu’à l’idéalisme national.

Entrevue avec Maurice Duplessis

Encore cette fois mon incurable optimisme aurait à déchanter. Un incident me revient en mémoire et que je m’en vais raconter pour la lumière qu’il projette sur cette page d’histoire politique. Parmi ceux qui ont adhéré au programme de restauration sociale no 2, nous connaissons Paul Gouin. Un autre y avait adhéré, au moins platoniquement, le chef du parti conservateur, récemment élu à la convention de Sherbrooke, Maurice Duplessis, avocat aux Trois-Rivières. Qui était-il ce nouveau chef de l’Opposition parlementaire à Québec ? Je le connaissais peu, ne l’ayant que rarement frôlé. Il n’avait guère la réputation d’un esprit grave, ni même sérieux, ni même cultivé. Il brillait plutôt par ses saillies, ses mots d’esprit, très fort en calembours. À L’Action nationale, nous avions pris l’habitude de publier un portrait littéraire de quiconque s’élevait au niveau de la vedette. Je demandai à mon bon ami l’abbé Albert Tessier, alors du personnel du Séminaire des Trois-Rivières, de nous écrire le portrait de Maurice Duplessis. L’abbé était un contemporain de la nouvelle vedette politique. Il la connaissait bien. L’abbé ne laissa pas de se faire prier ; « j’aurai à dire, me confia-t-il, des choses désobligeantes ». Assuré de l’incognito, ces portraits n’étant toujours signés que de trois étoiles, l’abbé accepta. Le