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de les réparer ? À ces questions, oserai-je dire, tout notre avenir est suspendu. À quoi bon, en effet, nous bercer de grands rêves, nous battre pour des buts de survivance, si, demain, nous sommes déjà le groupe humain qui délibérément gaspille ses meilleures forces, refuse de rester sur ses positions ?

Propos austères que d’aucuns estimeront même pessimistes. Et dire qu’en dépit de ces graves avertissements et de bien d’autres que je prodiguerai à cette époque à mes compatriotes, un jour viendra où je prendrai figure d’un marchand d’illusions, de colporteur de mythes ou de chimères.

Polémique avec le Canadian Forum

Parmi les distractions que l’on m’impose ou que je m’accorde, en cette même année 1929, dois-je retenir un bout de polémique avec un rédacteur du Canadian Forum ? Ce serait peut-être le lieu d’exposer mes relations avec quelques intellectuels anglo-canadiens ? Je compte le faire un peu plus loin. Pour l’instant, l’avouerai-je, si, en ce milieu-là, j’ai compté quelques amis, j’y ai surtout rencontré d’insignes aversions ou méfiances, d’ailleurs provoquées et cultivées par quelques-uns des miens, un Gustave Lanctot, par exemple, un Jean-Charles Harvey, quelques autres : courtisans de l’opinion anglo-saxonne ou plats valets des politiciens. C’est, en sa livraison d’octobre 1929 (p. 19-20), qu’un monsieur E. K. Brown me prenait à partie sous ce titre déjà suggestif : « The Abbé Groulx : Particularist ». Après un vif éloge du sénateur Chapais, historien, M. E. K. Brown me décrivait comme suit :