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mes mémoires

Vitalité émouvante que j’allais découvrir, encore plus volontaire, sur le chemin de mon retour, à Sudbury. Les Pères Jésuites m’y guettaient à mon passage pour une autre conférence à leurs élèves. Au Collège, ce soir-là, grande affluence aussi de prêtres, de professionnels des environs. Hélas, j’arrivais à Sudbury éreinté, fourbu par mon séjour au Manitoba et par trente-six heures de chemin de fer. Cependant, devant cet auditoire, mon discours aurait pour thème : « Confiance et espoir ». Tout de suite, il faut le dire, je me suis senti dans une atmosphère de chaude sympathie. À cette jeunesse, à ces compatriotes lointains, ai-je dit un tant soit peu de neuf ? Je ne le crois pas. Pourtant, de mes jeunes auditeurs de ce soir-là, rencontrés sur le chemin de la vie, m’ont plus tard avoué combien mes paroles les avaient remués. Preuve que, pour relever un peuple, même s’il lui faut parler franc, les motifs d’espoir valent encore mieux qu’un amer étalage de ses misères. Au surplus, pour prolonger, à Sudbury, l’écho de cette causerie, la Société historique du Nouvel-Ontario la publie en brochure. Encore un de ces opuscules qui, à l’âge où je suis parvenu, me rappellent le sort de la parole humaine, semence souvent restée sans germe, feuille morte, pousses avortées, charriées par le vent d’automne.

Cours à Saint-Jean-sur-Richelieu

Cette expérience de cours d’histoire populaire, les Sociétés Saint-Jean-Baptiste de Saint-Jean et d’Iberville me permettront de la tenter sur un plus large plan. Mon bon ami, Mgr Chaussé, supérieur du Collège de Saint-Jean, s’est fait le promoteur de cette tentative. Je donnerai à Saint-Jean vingt cours, cette fois, répartis sur deux ans, ou comme on l’écrit : deux « saisons », celle de 1944-1945, celle de 1945-1946 ; la première consacrée au Régime français ; la seconde au Régime britannique. Les cours ont lieu à la « Centrale catholique de Saint-Jean », le dimanche soir, mais d’assez bonne heure, pour ne pas déranger les projets de veillée. Chaque auditeur peut assister à l’une des séries, moyennant une carte au coût d’un dollar. Le Richelieu, journal de la ville, publie, sur feuille volante, un résumé de chaque cours, qu’on distribue dans l’auditoire. Il note, le 2 novembre 1944, que « près de 600