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V

MES DERNIÈRES ANNÉES

Dernières apparitions en public

J’entreprends ma quatre-vingt-neuvième année. La fin approche. Je le sens en mon hésitation à prendre certaines attitudes, à me prononcer sur maints problèmes brûlants. J’ai trop conscience de n’être plus de ce temps, de risquer de me tromper. Le silence, la discrétion, je me plais à le répéter, doivent être la vertu des vieillards. On ne s’engage dans une polémique qu’à la condition de la pouvoir suivre. Mon dernier discours publié date de mes 86 ans. Je l’ai prononcé à Québec, ai-je déjà dit, à la fin d’un congrès de la Fédération des Sociétés Saint-Jean-Baptiste du Québec ; mais après avoir tant hésité. On publia mon discours en brochurette sous le titre que je ne lui avais point donné, mais qui répondait à mon message : Orientation : Au seuil d’une ère nouvelle… Une nouvelle génération est venue. À partir de ce jour j’acceptai encore, pris à l’improviste, quelques petites allocutions ; je me refusai à toute conférence et à tout grand discours. Je ferai pourtant exception pour une réapparition à l’Université. Depuis mon départ en 1949, je n’avais guère fréquenté la maison. Mais le 3 novembre 1965 rappelait le cinquantième anniversaire de mon premier cours d’histoire du Canada à l’Université de Montréal. Premier cours de cette nature depuis 53 ans en nos universités françaises, c’est-à-dire, depuis les jours où l’abbé Ferland avait débité son Histoire du Canada devant un auditoire québecois. Mon ami, Michel Brunet, m’avait demandé deux causeries : l’une sur les origines de ce cours ; la seconde sur « ma