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L’Histoire Acadienne

des berceaux, les fils des martyrs vont chasser à leur tour les fils des persécuteurs.


Mesdames, Messieurs, l’histoire acadienne pose un angoissant problème. Devant ce malheur qui est au plus haut point, on se demande le pourquoi de cette grande infortune. Elle fait penser à ces catastrophes terrifiantes qu’une fatalité aveugle faisait s’abattre sur les héros des tragédies antiques. Mais nous qui croyons en la Providence, devons chercher de plus apaisantes explications. Cette histoire est un chapitre de la nôtre ; elle est donc une partie de notre patrimoine moral. S’il est entré dans ce passé tant d’épreuves, tant de catastrophes tragiques, ce doit être qu’une race française ne se forge pas comme une autre. Parce que nous portons dans un vase fragile un idéal supérieur, nous avons besoin d’une plus grande force de résistance. Et la force de résistance, vertu de fierté, se puise dans la beauté de l’histoire qui fait la noblesse de la race. Dans les heures troubles qui nous font trembler pour notre avenir, nous n’aurions qu’à descendre en nous-mêmes pour recouvrer les énergies libératrices. Qui sait ? l’analyse de notre sang nous le révélerait peut-être tout plein de globules héroïques. Et l’histoire acadienne, sublime prédication vivante, est là pour nous prêcher que si l’on peut faire serment de fidélité à une couronne étrangère, il est des mœurs, il est une langue, il est une âme auxquels un peuple français, dût-il lui en coûter tous ses biens, doit refuser à jamais le serment d’allégeance.

Quant à nos frères d’Acadie, le pourquoi de leurs grandes épreuves leur apparaîtra peut-être un jour dans le déroulement de l’histoire prochaine. Dans les luttes qu’ils ne pourront éviter, à me-