Page:Groulx - Notre maître, le passé, 1924.djvu/184

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prime l’espoir d’une reprise de la révolte jusqu’au triomphe définitif ? On ne ferait pas mal d’observer toutefois que « L’histoire de l’insurrection du Canada » est une brochure politique, presque un pamphlet, publié à Paris, à l’adresse du public de France, en vue d’obtenir une intervention du gouvernement de Louis-Philippe. D’une écriture romantique, sonore, c’est l’œuvre trop manifeste d’un exilé que les pires chagrins, y compris les misères d’argent, torturaient affreusement et qui a dû outrer quelquefois sa propre pensée.

Non, les vraies pages que l’on voudrait arracher de la vie du grand homme ne sont pas tant ces dernières que les autres, celles de la période qui suivit son retour au Canada, après l’amnistie de 1845. Pourquoi le rapatrié n’a-t-il rencontré parmi les siens que de si imprévoyants conseillers ? Sa correspondance nous fait voir un Papineau nullement désireux de rentrer dans la politique, puis bientôt dégoûté par les déboires qu’il y recueille. « Oh ! hommes et femmes, se plaignait-il avec douleur, le 27 janvier 1851, qui ne savez jamais ce qui vous attend au lendemain. C’est à présent qu’il est déplorable que j’aie cédé à ceux qui ont voulu me rejeter au parlement où je ne puis faire germer une seule bonne idée, où elles sont jetées à des têtes arides et à des cœurs pourris… »

À l’égard du régime politique d’alors, on lui a reproché son attitude irréconciliable. Fut-elle vraiment aussi intransigeante ? En l’année 1856 Papineau ne croyait déjà plus à l’opportunité d’une abrogation de l’Union. Dès cette époque, une mesure aussi radicale lui paraissait d’une opportunité périlleuse pour sa province,[1] Puis, à

  1. Voir une lettre à son fils Amédée, du 19 septembre 1856.