Page:Groulx - Notre maître, le passé, 1924.djvu/189

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Cette fois la pensée de Papineau perdait contact avec le réel. Cette erreur de son esprit, non moins qu’une autre cependant et qu’on a appelé d’un mot fort excessif, son anticléricalisme, l’isolèrent de ses compatriotes. Prochainement, nous l’espérons, nous essaierons de définir les idées religieuses de Papineau. Pour le moment, il nous suffit de fixer les doctrines et les attitudes de l’homme politique.

Dans la crise d’anticléricalisme qui sévit en notre pays, à l’époque de la Confédération, quel fut le rôle de l’homme acclamé alors volontiers par une petite coterie, comme son coryphée ? Cette fois encore la correspondance de Papineau atténuera, croyons-nous, la sévérité des anciens jugements. Le tribun ne se défendit pas toujours de quelques intempérances de langage à l’adresse du clergé. Il y avait en lui un frondeur mal contenu. À feuilleter, dans sa bibliothèque de Montebello, certaine « Vie de Voltaire », par exemple, on trouverait quelques annotations marginales qui étonnent de la part d’un esprit aussi libre et d’un tel gentilhomme. Il n’en reste pas moins que rarement il approuva et plus souvent blâma les manifestations de la jeunesse radicale, et qu’il prit cette attitude à l’heure même cette jeunesse exploitait le nom du grand homme comme un drapeau. Quand, dans la « Minerve » de 1839, Ludger Duvernay se lance à fond de train contre le clergé qu’il tient responsable des malheurs des temps, Papineau réprouve la tactique du journaliste.[1] Quand « l’Avenir » prône ses théories antichrétiennes et antisociales, Papineau déclare nettement que « l’exagération des vues réformatrices de « l’A-

  1. Voir Lettre du 19 avril 1839.