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Page:Groulx - Notre maître, le passé, 1924.djvu/19

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Notre Histoire

il faut savoir entendre qu’au milieu de nous vivent et s’agitent des hommes qui redoutent, à l’égal d’une calamité, la reviviscence du sentiment national. Le patriotisme crée un ordre en nous subordonnant à quelque chose de plus grand que nous-mêmes ; il atteint toutes les anarchies, toutes les formes de l’égoïsme. Aux yeux des déracinés et des apathiques, les patriotes feront toujours figure de sonneurs de trompette et de Catons grincheux. Notre devoir est d’accepter cette longue bataille et de vouloir que l’esprit de race finisse par l’emporter sur l’esprit de parti. La cause du patriotisme et du réveil national devra disposer d’assez de constance et d’assez de force pour écraser toutes les résistances de l’apathie et de l’intérêt.

Pour nous résoudre à cet effort, il suffirait de nous rappeler quelques-unes de nos responsabilités. Nous faisons partie d’une fraternité française en Amérique. Ce n’est pas principalement sur la France que les autres groupes français du continent appuient leur volonté de survivre. Pour tous, la province de Québec, cœur de l’ancienne Nouvelle-France, est la première patrie du souvenir, la capitale du patriotisme français. C’est parce que la vallée laurentienne a été le berceau de leur race, la terre où dorment leurs ancêtres, où se conserve le trésor de souvenirs, de mœurs et de vertus qui fait le fond de leur âme ; c’est parce qu’ils se sentent liés à toute cette histoire et à toute cette noblesse, que nos frères dispersés veulent en perpétuer l’héritage. Mais c’est nous qui sommes les leviers de leur volonté. Pas un de nos sursauts de fierté qui ne produise chez eux de plus fortes résolutions de vivre ; pas une de nos apathies qui ne se fasse suivre d’un fléchissement de l’espérance française. Comment espérer qu’ils