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Monseigneur Taché

pays allait solder la façon de ces faiblesses. Il n’est pas arbitraire de penser que la révolte des Métis de 1885, que l’odieuse loi des écoles de 1890 et l’agitation qui suivit, eurent leur cause lointaine dans l’injuste refus de l’amnistie. Le fanatisme savait désormais combien il était facile de faire trembler le pouvoir fédéral et ce que valait la puissance de ce dernier pour la protection des minorités. Dans un dernier effort il résolut de mener à bout la besogne qu’il avait dû laisser inachevée en 1870. En ce temps-là, il avait voulu, en propres termes, éliminer de l’Ouest l’élément français et catholique. Vingt ans plus tard il prétendit consommer son œuvre par la suppression des écoles catholiques et l’abolition de l’usage officiel de la langue française.

Ces lois de 1890 sont le suprême coup de force dans l’histoire canadienne depuis la Confédération. La mise en pièces d’une loi fédérale et impériale qui datait à peine de vingt ans ; la répudiation d’un traité conclu dans des circonstances qui paraissaient le rendre inviolable et dont plusieurs signataires vivaient encore, tout cela signifiait un mépris effroyable du droit. Puis, quelle amère et concluante épreuve contre la fragile unité d’un pays où ne se trouvait point assez d’esprit public pour empêcher ce coup de force ou le réparer !

Selon les prévisions humaines, ce pouvait être pour Mgr Taché la ruine totale de l’œuvre de sa vie. Ses travaux et ses sacrifices, ceux de ses frères, les missionnaires, les ouvreurs de chemin dans la sauvagerie, rien de tout cela, devant les nouveaux venus, ne donnait à sa race le droit de vivre. Dans l’œuvre des écoles catholiques, il avait placé ses plus fermes espérances d’évêque pour le maintien de la foi. « Pourquoi ne le dirais-