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Page:Grout - Passage de l'homme, 1943.djvu/108

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PASSAGE DE L’HOMME

à grandes pelletées, sur le premier des trois cercueils. « Va-t’en, ma fille ; si le Curé savait que je t’ai parlé !… »

Je descendais par le petit sentier, celui qu’on ne prend presque jamais, tant il est abrupt et caillouteux, celui-là même que vous vouliez prendre hier, et qui tombe juste au pied des Ruines, et je songeais à tout ce que j’avais vu, et j’essayais de bien comprendre, lorsque quelqu’un se dressa devant moi, quelqu’un qui avait comme jailli d’un arbre, quelqu’un, on aurait dit, qui, l’instant d’avant encore, était un arbre. Je poussai un cri. « Tu cries, tu cries, Geneviève ! Est-ce que tu ne me reconnais pas ? » Et l’étrange créature se mit à rire, d’un rire qui n’en finissait pas. Alors seulement, je reconnus l’idiot. « La belle journée, dit-il ; dis, trois morts pour Monsieur le Curé ! Et le Bon Dieu, là-haut, dis, ce qu’il va être content ! Il paraît qu’ils manquent de clients au Paradis… Veux-tu une robe ?… Et il y a le Fossoyeur ! le Fossoyeur aussi va être content. Et ceux qui pleurent, est-ce que tu crois qu’ils ne sont pas contents aussi ?… Prends garde, Geneviève, si tu allais tomber ? Dis, si on tombait tous les deux ? Tu es belle fille, sais-tu, Geneviève. Si tu voulais… » Il mit la main sur mon épaule. Alors je le poussai rudement et il