Aller au contenu

Page:Guèvremont - En pleine terre - paysanneries - trois contes, 1942.djvu/110

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
112
Germaine Guèvremont

Ludger consent de grand cœur, sans chercher à esquiver la rude corvée :

— C’est pas de refus. Avec l’aviron, deux paires de rames et de la précaution, on devrait se rendre sans périr.

Marie-Amanda n’ignore pas le risque que son mari encourra, mais elle ne songe même pas à l’en détourner. Mieux, elle l’encourage :

Va, mon Ludger, puisqu’il le faut !

***

Le train fait à la hâte, ils ont couché la morte, parée de ses vêtements du dimanche et enroulée dans une couverture grise, sur un lit de paille à la tête de la chaloupe. À trois ils glissent l’embarcation, à l’aide d’un traîneau, sur la glace vive des bordages jusqu’à l’eau noire du fleuve. Sur la rive, des amis, par petits groupes, les accompagnent du regard. En route pour le voyage de peine et de misère !

— L’eau est forte, remarque Avelin, en s’éloignant de l’île.

— Oui, répond Ludger, on a encore l’eau d’automne contre nous autres.