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Toujours la même turelure !

Pour les hommes, le train du matin, le bois, les charrois, parfois une visite clandestine à quelque ouache de rats musqués, le train du soir et de longues heures d’oisiveté à fumer la pipe. Un voyage au marché de Sorel, le samedi, la grand’messe, à Sainte-Anne, le dimanche, demeuraient leurs meilleures distractions.

Pour les femmes les trois repas interrompant les besognes domestiques, parfois une assemblée entre voisines, à tailler de la catalogne ou à natter de la guenille, tout en se faisant aller la langue.

Avec février une tempête se leva sur la campagne. Pendant deux jours au delà, elle souffla sans répit. Et tout le temps la neige tomba. Elle tomba par étoiles, par flocons, par brins, tantôt fine et poudreuse, tantôt folle et tantôt frivolante. Peu à peu elle combla les creux, coucha les clôtures qu’on avait négligé d’enlever et abolit les frontières. Bientôt elle emprisonna chaque habitation. Puis elle isola le Chenal du Moine.