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MARIE-DIDACE

— V’là ce que j’appellerais cochon, dit Amable, en bâillant.

Phonsine fit signe à Amable de se taire. Le père Didace, la figure rouge et fâchée alla au cabanon. Du fond, il tira la vieille paire de raquettes que le Survenant avait réparées l’année précédente. Ses pouces s’attardèrent à éprouver le nerf tressé.

— Mes souliers mous, sortez-les ! ordonna-t-il aux femmes pendant qu’il se déchaussait.

Phonsine lui apporta ses mocassins.

Devinant le dessein de son père, Amable lui dit sincèrement :

— Vous êtes trop vieux pour vous barauder la nuitte, en raquettes, à travers les champs. Restez donc contre le poêle. Votre place est icitte, pas dehors.

Didace éclata :

— Faut-il être simple d’esprit pour parler de même. Si on dirait pas que la mousse est à la veille de prendre après moi. Vieillir… vieillir… j’suis pas tout seul. Oublie pas une chose, mon gars, pour chaque jour d’âge que j’attrape, t’en attrapes d’autant !

Il se leva :

— J’ai jamais vu un Beauchemin avoir si peu l’esprit de paroisse ! On dirait qu’il est comme le poisson armé : il a la chair de travers.