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MARIE-DIDACE

fant restait agenouillée jusqu’à la fin de l’office. Yeux fermés, mains jointes, elle offrait sa fatigue pour son père qui lui avait fait promettre d’obéir.

* * *

— Buvez votre thé avant qu’il refroidisse ! ordonna l’Acayenne.

Phonsine tressauta, une buée de larmes aux yeux. Dans la tasse le liquide trembla.

— Eh ! eh ! cria l’Acayenne, votre thé va chavirer !

Phonsine ravala ses larmes. En un éclair, les regards des deux femmes se croisèrent, celui de l’Acayenne, fuyant, glauque, insaisissable. « Des yeux tantôt bleus, tantôt verts, changeant comme l’eau de rivière », avait dit le Survenant. Phonsine pensa : « Une couleuvre parmi les grandes herbes. »

Du dehors, le père Didace, les mains en écran, regarda par la fenêtre. À la vue des deux femmes qui buvaient côte à côte, tout heureux il crut qu’elles s’entendaient déjà. De son index replié, il frappa dans la vitre pour appeler joyeusement sa femme.

Sitôt qu’elle fut seule, Phonsine courut à sa tasse. Elle, qui y faisait fondre le sucre à petits coups appliqués doucement, sans jamais en heurter les