Page:Guérin - Journal, lettres et poèmes, 1864, 6e éd.djvu/427

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le dieu Pan, toujours solitaire, tantôt le chœur des divinités secrètes, ou passer quelque nymphe des montagnes enivrée par la nuit. Quelquefois les aigles du mont Olympe traversaient le haut du ciel et s’évanouissaient dans les constellations reculées ou sous les bois inspirés. L’esprit des dieux, venant à s’agiter, troublait soudainement le calme des vieux chênes.

Vous poursuivez la sagesse, ô Mélampe ! qui est la science de la volonté des dieux, et vous errez parmi les peuples comme un mortel égaré par les destinées. Il est dans ces lieux une pierre qui, dès qu’on la touche, rend un son semblable à celui des cordes d’un instrument qui se rompent, et les hommes racontent qu’Apollon, qui chassait son troupeau dans ces déserts, ayant mis sa lyre sur cette pierre, y laissa cette mélodie. Ô Mélampe ! les dieux errants ont posé leur lyre sur les pierres ; mais aucun… aucun ne l’y a oubliée. Au temps où je veillais dans les cavernes, j’ai cru quelquefois que j’allais surprendre les rêves de Cybèle endormie, et que la mère des dieux, trahie par les songes, perdrait quelques secrets ; mais je n’ai jamais reconnu que des sons qui se dissolvaient dans le souffle de la nuit, ou des mots inarticulés comme le bouillonnement des fleuves.

« Ô Macarée ! me dit un jour le grand Chiron dont je suivais la vieillesse, nous sommes tous deux centaures des montagnes ; mais que nos pratiques sont opposées ! Vous le voyez, tous les soins de mes jour-