Page:Guerne - Les Siècles morts, I, 1890.djvu/169

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Et que son peuple, au bord des fleuves étrangers,
Soit comme un daim, qui tremble au bruit de la poursuite,
Ou qu’un frisson de vent dans des arbres légers
Réveille, fait bondir, effare et met en fuite.

Puis les pentes des monts et les plaines d’en bas,
Infécondes enfin, libres, abandonnées,
Sous un morne soleil connaîtront leurs sabbats
Et jouiront en paix du repos des années.

Alors, quand, frémissant d’angoisse et dévorant
Les fruits de leurs péchés et leurs fautes accrues,
Mes fils, courbant l’épaule au joug du conquérant,
Glaneront leur pâture aux carrefours des rues ;

Quand ma vieille fureur, comme un vin fermenté,
Débordera le vase où bouillait ma colère ;
Quand mes fils, gémissant au nom de leur Cité,
Lèveront leurs yeux morts vers le Dieu tutélaire ;

Alors, me souvenant, dans mes cieux éclaircis
Je déploierai mon arc et ma lumière neuve,
Et je purifierai leurs cœurs incirconcis,
Comme un haillon souillé qu’on lave dans un fleuve.

Et l’alliance antique, Abraham, le serment,
La race d’Iaqob, vivant dans ma mémoire,
O peuple ! je ferai luire éternellement
L’Astre de ma puissance et le jour de ma gloire.