Page:Guerne - Les Siècles morts, II, 1893.djvu/120

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La ville austère où tu grandis.
Vendangeur des amours légères,
Viens aux lèvres des étrangères
Cueillir les baisers interdits !

Clos le vin d’Ên-guédi dans les outres scellées,
        Pour nos festins, ô vigneron !
Pour ceindre nos cheveux de roses assemblées,
        Esclaves, dépouillez Schâron !

Viens ! tu verras nos Dieux antiques,
Dans l’ivoire ou l’airain sculptés,
Resplendissant sous les portiques,
Sourire aux jeunes voluptés.
Dorothéos, un Dieu t’accable ;
Barbare, jaloux, implacable,
Il dort en son temple fermé.
Si la vie, hélas ! n’est qu’un rêve,
Redoute, enfant (car l’heure est brève),
De mourir sans avoir aimé.

Les flambeaux ont brillé, les coupes d’or sont pleines,
        Les lits prêts aux hymens joyeux ;
Et ta place est choisie, à nos festins hellènes,
        Auprès des femmes aux doux yeux.


La porte s’ouvre. Dorothéos, jeune Juif hellénisant, apparaît sur le seuil. Il est vêtu d’une tunique de soie teinte : sa tête est couronnée de lierre. Derrière lui, par l’entre-bâillement de la porte, ses amis aperçoivent dans l’ombre une courtisane étrangère.