Page:Guerne - Les Siècles morts, II, 1893.djvu/163

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Viens ! Il n’est point ici de révoltes subites.
La chair est un haillon qu’on rejette en entrant ;
Toute humaine lueur s’éteint dans tes orbites,
O toi qui veux t’asseoir parmi les Cénobites,
Au terme inattendu de ton voyage errant !

Offrant l’oblation sans tache et volontaire,
Esclave du serment et prisonnier du vœu,
L’esprit vers la clarté, mais les yeux vers la terre,
Courbé de l’aube au soir par le labeur austère,
Jette à ce qui vécut l’irrémissible adieu.

Loin de la foule impure et des tribus serviles,
Tu creuseras ton lit dans le roc souterrain ;
Tu ne souilleras point tes regards dans les villes
Où des blocs monstrueux, sculptés en formes viles,
Figent l’obscénité de l’exécrable airain.

Mais délaissant tes biens, tes champs et ta demeure,
Comme un fardeau trop lourd assez longtemps porté,
Sans qu’un souvenir vive ou qu’un regret t’effleure,
Tu choisiras ta part qui sera la meilleure :
L’incorruptible, heureuse et sainte Pauvreté.

Tel qu’un prêtre zélé, debout avant l’aurore,
Lève tes bras en croix vers le soleil tardif ;
Salue à l’Orient l’astre qui vient d’éclore ;
Puis, jusqu’à l’heure ardente, ouvre d’un fer sonore
Dans la glèbe rebelle un sillon productif.