Page:Guerne - Les Siècles morts, II, 1893.djvu/91

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Des demeures aux murs ceints de fleurs ou d’étoffes,
Des gradins somptueux où sont les Philosophes,
Une acclamation, pareille au bruit que font
Les lourdes eaux croulant en un gouffre profond,
Roule, s’enfle et mugit aux pieds de Ptolémée.
Et la royale Sœur, Bérénice, charmée,
Chère aux Dieux, le cœur plein d’allégresse et d’orgueil,
Vers la blonde toison lève en tremblant son œil
Et contemple, à travers la forêt des pilastres,
Sa propre ascension parmi le chœur des astres.

Et, comme en toute chose un hommage pieux
Par les mortels prudents est dû toujours aux Dieux,
Il sied qu’un chant nouveau de la sonore lyre
Des Poètes émus excite le délire,
Le premier, le plus grand, celui de qui les vers,
Coulent comme une source au sein des gazons verts,
Kallimaque, gardien des livres, noble chantre
Des fontaines, des bains de Pallas et de l’Antre
Où la vierge Artémis, dans le bois écarté, ,
Dérobe en s’enfuyant sa blanche nudité,
Kallimaque saisit la lyre encor muette.
Elle frémit, il chante ; et l’hymne du Poète,
Défiant la lenteur des siècles et l’oubli,
Plane dans le silence austère et recueilli
Et s’élançant enfin, comme une aile inspirée,
D’un vol harmonieux monte vers l’Empyrée.