Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/152

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Et le verger fertile et la haie épineuse,
Et la barrière agreste où le déclin du jour
Te surprenait, ô vierge, accoudée et rêveuse,

Quand, de l’autre côté se dressant à son tour,
Daphnis, tremblant lui-même et comme toi timide,
Te contemplait dans l’ombre et te parlait d’amour.

Comme ton cœur battait sous ta blanche khlamyde !
Érôs discret et pur volait au fond des cieux
Et Sélènè complice argentait l’herbe humide.

O jours sacrés ! jeunesse ! ô chœurs mélodieux
Qui ne charmerez plus son âme sans reproche.
Nymphodora vous pleure en d’éternels adieux !

Nymphodora vous fuit. Quelle est dans Antioche
Celle qui sur un char d’ivoire et d’or s’assied ?
Un peuple entier l’acclame et rit à son approche.

Devant elle l’encens fume sur un trépied ;
L’air, quand elle a passé, garde un parfum de myrrhe ;
La vapeur du styrax comme un nimbe lui sied.

Son nom, Nymphodora, de Byzance à Palmyre
Fait, comme un chant de flûte, au cœur de ses amants
Renaître un songe heureux où sa beauté se mire.