Page:Guerne - Les Siècles morts, III, 1897.djvu/200

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O bienheureux salut qui, dans l’azur en fête,
Fais retentir encor la harpe du Prophète,
Et le chœur angélique et les Saints vénérés
Exulter d’allégresse au bruit des chants sacrés !
Ainsi qu’un holocauste, épuré par la flamme,
Divin Martyr, Jésus ! je te livre cette âme,
Libre, guérie, enfin comme tu la voulus,
Pour la vêtir, ô Christ ! du manteau des élus
Et, l’arrachant de force au monde ingrat et rude,
La couronner de gloire en ta béatitude.
Seigneur, ayez pitié ! Recevez-la, Seigneur,
Dans la paix éternelle et l’éternel bonheur ! —

Et, traçant dans l’espace un signe emblématique,
Évagrius, suivi du peuple fanatique
Des moines, précédé d’un diacre tondu,
Foula l’obscur pavé, noir de sang répandu,
Traîna sa robe longue au flot visqueux des dalles,
Y trempa jusqu’au bord le cuir de ses sandales,
Franchit la porte basse et disparut sans voir
Un sang miraculeux goutte à goutte pleuvoir
Des branches de la croix devant ses pas portée,
Ni pâlir sur le bronze une face irritée,
Ni dans l’ombre pleurer Jésus qui s’indignait
Et solitairement, le flanc percé, saignait.