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Rhône ; ils passent la Durance dans une barque, et la Sorgues à gué. Ils dépassent Tarascon et s’avancent droit sur Orange, dont ils aperçoivent bientôt les murs et les fossés, les hautes tours et le château avec ses pinacles couronnés de pommes ou d’aigles dorés. Ils entendent les oiseaux qui chantent à l’intérieur, les cris des faucons et des autours, les hennissements des chevaux et le clabaudage des mulets, ainsi que le bruit que font les Sarrasins.

— Seigneur à qui je dois la vie, s’écrie Guillaume, quelle admirable cité ! Bienheureux celui qui en est le maître !

Ils s’avancent jusqu’à la porte, et Gilbert ayant appelé courtoisement le portier, lui dit en sa langue :

— Ouvre la porte et laisse-nous entrer ; nous sommes des envoyés venant, d’outre-mer, d’Afrique. Nous appartenons au roi Thibaut l’Esclavon.

— Voilà du nouveau, dit le portier. Qui êtes-vous, vous qui m’appelez là dehors ? Le roi Arragon n’est pas encore levé, et je n’ose pas ouvrir la porte par crainte de Guillaume au court nez, qui s’est audacieusement rendu maître de Nîmes. Attendez-moi là, je vais parler au roi, et s’il le permet, je vous ferai entrer.

— Hâtez-vous, lui dit le comte Guillaume, et prenez garde de ne pas nous faire attendre.

Et sans plus de délai le portier monta les degrés de marbre du palais, et s’étant rendu près du roi Arragon, il lui dit :

— Sire, prêtez l’oreille à ce que je vais vous dire. Il y a, à la porte du château, trois nobles Turcs qui viennent d’Afrique à ce qu’ils prétendent.

— Vite, frère, laisse-les entrer ; il me tarde de leur demander des nouvelles de mon père. Tu es déjà resté trop longtemps.

Et le serviteur court leur ouvrir la porte.

Voilà donc Guillaume entré dans Orange, et avec lui Gilbert et Guibelin ; mais il n’en sortiront pas comme ils