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mille onces à Voirecombe ; elle la lui ceignit au flanc au moyen du baudrier aux longues courroies. Enfin elle lui mit au cou une targe ronde et lui donna un épieu au bois gros et armé d’une longue pointe d’acier.

Gilbert fut armé de même. Mais à peine avaient-ils eu le temps d’endosser leur armure, que voici les païens qui avaient trouvé moyen de s’introduire dans la tour et montaient vers l’étage supérieur. Le comte Guillaume se jette sur Haucebier, Gilbert attaque Maretant, le portier, et Guibelin de son côté fond sur Turfier. Ces trois-là furent bientôt morts. Cependant leurs lances ayant volé en éclats, les trois chevaliers tirèrent l’épée.

Le comte Guillaume frappa un païen à travers le corps et le coupa en deux, comme une branche d’olivier ; les deux moitiés tombèrent sur le pavé. Gilbert, du premier coup qu’il porta, fit voler la tête d’un certain Gaifier. Guibelin ne montra pas moins de courage ; il serra son écu contre sa poitrine et brandissant son épée, il tua tout ce qu’il atteignit. Les païens reculent et bientôt s’enfuient pleins de terreur ; les nobles guerriers français se mettent à leur poursuite et en ont bientôt tué quatorze. Le reste, frappé de terreur, se laisse repousser hors de la porte, que les Français se hâtent de fermer et de verrouiller sur eux.

En voyant la déroute des siens, Arragon leur crie :

— Fils de putains, qui vous laissez chasser, jamais vous ne tiendrez de moi fiefs ni honneurs, si vous ne les attaquez de plus belle.

Les mécréants obéissent à sa voix ; ils lancent épieux et dards sur l’ennemi et se mettent à attaquer les murs avec des marteaux de fer.

— Guibelin, mon neveu, comment leur résisterons-nous ? Nous ne pourrons échapper à la mort !

— Oncle Guillaume, laissez ces folles paroles. Par l’apôtre que les pèlerins implorent ! je me vendrai cher, avant que les païens me tiennent.