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— Reprenez courage et empoignez vos épées. Ne voyez-vous pas les anges qui nous entourent pour nous attendre ? Par ces grandes douleurs nous marchons vers la joie éternelle ; l’archange saint Michel nous montrera le chemin du ciel. Frappons de toutes nos forces sur les païens, car c’est le dernier jour de notre vie.

À ces paroles les barons se rejettent dans la mêlée ; ils frappent et tuent autant que possible. Vivian pourfend tous ceux qui se trouvent sur son chemin avec autant de facilité que si c’étaient des fleurs qu’il abattait.

— Les diables lui ont rendu ses forces, disent les païens ébahis, puisqu’il est en état de nous faire tant de mal.

Desramé rassemble autant de monde qu’il peut ; il y en avait de tous les pays qui lui sont tributaires, et ils étaient bien cent contre un des nôtres. Bertrand n’aurait pas longtemps pu résister à cette masse, lorsque sur la hauteur parurent Guillaume et ses gens. À son approche les païens se le montrent et font un mouvement en arrière ; car ils ont peur de Guillaume dont ils n’attendent aucune merci.

— Voilà le moment décisif, dit Desramé. Haucebier, le roi de Golienne, Clariel et Maucarré relevèrent son courage.

— Ne craignez pas cette canaille, firent-ils ; bientôt vous serez maître de leur glouton de chef ; c’est pour la dernière fois qu’il mènera ce grand bruit. Tous les siens mourront, à moins que Mahomet ne les dédaigne ; et lui-même nous le ferons prisonnier, ce traître félon, qui tant de fois vous a causé du chagrin, qui enleva à Thibaut sa femme et qui tient encore en son pouvoir sa ville et sa terre. Quand vous l’aurez entre vos mains, vous le ferez mener à Palerme, dans vos états, et vous le ferez juger d’après nos lois.

Guillaume n’attendit pas qu’ils vinssent à lui. Il montait le vigoureux Baucent ; son heaume bruni étincelait au soleil comme son haubert. À sa lance effilée un gonfanon était attaché par trois clous dorés. Il avait l’air d’un fier com-