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I.


Entrée au couvent.


Pendant de longues années le marquis Guillaume, le brave seigneur d’Orange, de Nîmes, de Tortelose et de Porpaillart-sur-mer, vécut avec sa femme, Guibor-la-belle. Durant sa vie, la dame au clair visage avait souffert bien des peines ; mais aussi elle avait éprouvé mainte joie. Et le seigneur Guillaume avait vu tous ses désirs accomplis depuis qu’il avait fait la paix avec le roi Thibaut. Après qu’il eût triomphé de ses ennemis, il règna en paix sur tout le pays qui s’étend jusqu’à la mer, sur bois et sur prés ; et il fut tellement redouté des païens, qu’ils tremblaient quand seulement on prononçait son nom.

Enfin dame Guibor fut prise d’un mal dont elle ne put relever. Pendant trois mois elle resta étendue sur la couche qui devait être son lit de mort, au grand regret de son époux, de ses parents, des dames de sa suite et de tous les chevaliers, dont elle fut bien aimée.

La mourante fit appeler le comte Guillaume et lui dit :

— Je suis bien malade ; je sens que je n’en réchapperai pas. Nous avons vu de bien beaux jours ensemble ; en cette heure suprême je vous prie, au nom de Dieu, de me pardonner, si jamais je méfis envers vous, soit en paroles soit en pensée.