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Trois païens galopent après lui ; mais ils ne parviennent pas à l’empêcher de gagner la ville. Les cent hommes sortent de leur embuscade pour couper aux Sarrasins la retraite vers le camp ; et voilà le combat engagé. Thibaut remarquant le danger imminent des siens, leur crie :

— Barons, retournez au camp ; car si ceux de la ville font une sortie, vous êtes morts. Je m’en vais parler à Hermengard et lui offrir une rançon pour le fils du Khalife.

En effet il s’avança jusqu’au pied de la tour qu’habitait l’indomptable Hermengard, et se mit à crier :

— Noble comtesse, pourrais-je vous parler ?

À cet appel Aymer parut et alla s’accouder à la fenêtre ; il aperçut Thibaut au pied de la tour, qui lui dit en haussant la voix :

— Chevalier, écoutez-moi. Si vous me rendez le fils du Khalife, je vous donnerai autant d’or et d’argent, autant de pièces de drap d’or et de soie que vous voudrez.

— Je n’ai que faire de vos propositions, dit Aymer ; car par l’apôtre Saint Pierre ! il ne touchera pas un morceau de pain, avant que mon frère ne me soit rendu sain et sauf avec ses armes et son cheval. Ce n’est qu’alors qu’il sera question de rançon. Elle consistera en quatre-vingts muids de froment et autant de vin ; mille hauberts, mille heaumes, mille écus et mille lances acérées ; mille cochons et mille bœufs salés. Si vous ne faites ce que je vous dis, je le pendrai sur cette colline où vous voyez ces deux arbres.

— Vous aurez tout ce que vous demandez, répondit Thibaut.

Quand il revint au camp les païens coururent à sa rencontre et lui demandèrent s’il avait réussi dans sa négociation ?

— Parfaitement, répondit-il, par Mahomet mon seigneur ! car le fils du Khalife nous sera rendu. Cependant il faudra payer une rançon si grande que jamais on n’a vu rien de semblable.

Il fit aussitôt venir Buevon devant lui et donna l’ordre