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que leger ou fort qu’il soit, qu’il ne fende en deux jusqu’à la ceinture, s’il l’atteint de sa tranchante épée.

— Ce vieux est enragé, crièrent les païens ; celui qui l’attendra fera une mauvaise rencontre, car l’aide de Mahomet ne lui servira de rien.

— Il n’ira pas plus loin, firent les plus braves d’entre eux ; et ils fondirent sur lui en lui lançant mainte lance au fer tranchant. Aymeric fut frappé par derrière et par devant, sur son écu et sur son heaume. Son destrier reçut quinze blessures et tomba sous lui. Le comte se dégagea des étriers ; mais sa défense ne lui servit pas à grand’chose : le nombre des assaillants était trop grand.

Aymeric se trouve à pied au milieu de la cohue, l’écu au cou et l’épée à la main : celui qu’il atteint, il lui fend la tête. Voilà Thibaut qui fend la presse en criant :

— Par Mahomet ! vous êtes pris.

En disant ces mots, il le saisit par le nasal du heaume et le pousse entre les mains d’Aquilant de Luiserne, d’Aarofle et de trois autres rois.

— Gardez-le-moi, nobles Sarrasins, leur dit-il ; et par Mahom ! qui nous nourrit et nous gouverne, s’il n’est pendu avant Vêpres, vous perdrez tous la tête par cette épée.

— Vous pouvez avoir confiance en nous, répondirent-ils.

Ils se hâtent de garrotter le comte ; ils lui serrent tellement les deux poings que le sang jaillit de ses ongles. Ils le conduisent sur une hauteur, où il ne cesse de se lamenter et d’appeler à son aide Bernard et Guillaume.