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AUGUSTE ET NOÉMI,

PAR MADAME DEMANTE-GUINARD.

Un volume in-8° -- Chez René et Cie

Un pauvre mère a perdu dans la même année deux de ses enfans, le frère et la soeur, Auguste et Noémi ; celui-ci avait huit ans bientôt, celle-là en avait neuf à peine. Les ceux petits anges manquent à la famille ; mais bien qu’ils ne soient plus parmi les fleurs de ce monde, la mère les voit toujours blonds et roses et rieurs comme ils étaient. Morts pour tous, même pour leurs frères et pour leurs sœurs, ses deux enfans envolés sont toujours là pour la mère ; elle les voit, elle les entend, elle leur fait répéter leurs prières du matin et du soir, elle assise encore, attentive et tremblante, à leurs joies faciles, à leurs douleurs passagères. Auguste est toujours l’enfant pétulant sur la verte pelouse, Noémi est toujours le beau petit rêveur qui portait vers le ciel son long regard bleu comme le ciel. De cette contemplation infinie d’une mère pour l’entant qu’eUe a porto dans son sein et dans Mn cœur est rMuttëeiapoeaië.La poésie, c’est !e rêve, c’est Tidëai, c’est t’esperancc, c’est le souvenir, c’ftout ce qui n’est pas do la terre, tout ce qui a passé sur !a twre. Quiqus vous soyez, qui voûtez être un poëte. ne Merchez pas à être un poète. Non .pas d’efforts pas de Mttes, pM de travaux pënibtcs. pas d’esprit, pas d’esprit eurtout! Mais en revanche taiMex faire t’amour et h dou- leur, laissez faire la croyance et l’espoir, laissez à leur toute-puissance sur votre Ame, les saints aspects de !a na- ture, la aeur qui s’épanouit, i’earesplendit au ciel, l’enfant nu berceau, le vieiUard au so- tei). t<* mort dans ta tombe, bissez atter ça et !à tous )cs nobtes instincts, vous verrez ta poës{e venir à vous toute Manche, et toute sainte, et toute chantante; soudain eUe vous tendra Mmainsecourabte,(’i)e Vous couvrira de t~ajnspiratitto bien veittan~e comme d’une ëgido, et a!on les chants vendront à votre âme comme tes tarmes sont vepoe~ à vos y<-ux. >,

Ainsi a été fait ce doux Recueilavec tous !~s hasards me)o(neux de la douleur. Cette mère a souffert, et elle a chante; v~)i)à toute t’histoire de M poésie, ptte a rêve ion~ temps quaad eUe ~tait une


jeune fille; après le rêve est venue l’action, l’action souveraine et sainte de la mère de famille sur les siens, et après l’action est arrivée naturellement la poésie, comme s’élève la brise rafraîchissante après l’heure ae midi et tes cruelles chaleurs. Aussi, quand vous ouvrez ce livre, je ne sais quel honnête parfum s’en exhate. Avez-vous ren- contré, le matin d’un long voyage, quMque belle prairie diaprée de blanches marguerites par un beau jour de prin- tempsî Le soleil sourit doucement au-dessus de votre tête, la rosée est à vospiods.ot BonsoulemenMa rosée, mais cette myriade d’étneraudcs naturelles qui exhalent leurs timides parfums autour de vous. Mais comment donc sans sacrilège se frayer un sentier dans cette verdure émaiHëe de Oeurs? T Comment fonter aux pieds ces Manches marguerites? D’a- bord vous hésiter vous voûtez revenir sur vos pas et pren- dre le plus long sentier, tout couvert de poussière. Allez toujours) La Providence est grande! La ûeur est patiente et légère; regardez plutôt, votre pied n’a pas laissé de trace; un instant foulée, la marguerite se relève, soulevée par la brise bienfaisante, par la rosée qui féconde, par le rayon tout-puissant du soteil. Il Laissez donc chanter cette pauvre femme, qui que vous soyez, et prenez votre part dans ces honnêtes inspirations qui viennent de Dieu c’est eMe-méme qui vous y convie, sans redouter que le soufue tni manque. Arrivez, et me!ez- Toas à ses douteurs les douleurs ne manquèrent pas pour l’avenir, non ptus que tes beaux vers. Ce noble cœur est doublement inépuisable; car il renferme tout à la fois la poésie et l’amour maternel. Ecoutez-la. Naguère encore elle était une jeune SHe silencieuse et modeste; depuis un an la jeune 6)le est devenue une femme bien plus !a voilà déjà qui sent tressaiXir ses entraiHes fécondes; quelque chose s’est agité dans ce jpnne sein materne!. Elle chante alors un hymne de triomphe «<’tà, qu’elle n’a pas vu enoMe?Oui, celui-tà aura son hymne de bien-Tenue, il aura son tressaillement extérieur; trou- vera sur les lèvres materaeUes, avec le premier sourire, l’action de grâces à peine interrompue par les douleurs de l’enfantement

Tendre fleur qui dois naitre en la saison des roses,

Hôte encore inconna qai sout mon aetn reposes,

Faible enfant, quel sera ton sort ?

Et la voilà qui s’inquiète et qui trembte à l’avance. La voita quis’écno « Tu vivras! comme si déjà elte pou- vait prévoir qae plane la mort sur ce berceau ~ide encore. Qui lui dit cependant à l’avance toute cette douh’ur? Com- ment la sait-eUe ? Poarquoi tout cet accablement qui l’entoure ? Mon Dieu ! ces âmes poétiques sont douées d’un sixième sens invisible, inexpuquë, inexpticabie. Cette âme est triste parce qu’etie a vu toutes sortes de deui!s, de mi- sères, d’accaNcmens, de tombes entr’ouvertes, d’ûn!oM brisées. :WM~ Tous ces infortunés, je tes a) vas heureux

J’ai partagé tenrjoieet je p)eure sar eux. ’°* lis pteareroat sur mon, Meotôt. Demain,peut-être’ Ainsi e)!e s’attriste par sympathie pius encore que par prévoyance. Cependant ie premier enfant, tonc-temps eme vient au monde. Dieu soit !ouë! ï/oofànt a,.tout~~M~ parences de"~ santé et de~ ta vie, et mainteMBt’pRu de

transes~~s d~inquiëtudes, plus de presiientimens funestet

<& ~~Wtt d< boatr ei!e s’en ya, sa a!te à !a ïnamenB,’ pour cMt~vor, tes c~mps, les J~ à Mrg GMre! Louange à pi’Tout M~n~nt~t~~tear!~ ’?


mfat~~ c’est ~0~ i Tjf~

~iurmonsetntaj’eposea~~t~ M’t ’m~~fî; Mis, je te tiens-, tu vis ~~VU< T-)~Mr< Qae’taeMtNM’dMstoa soartre, "a M Que ~’innocence dans tes y eax!

Et !a jeune mère .abandonne tant qu’eiïe peut à son ra vistement. Je voudrais pouvoir, voM dire toute cette extase si vive, si naturen&i naïve. QueHe joie! Mais, hétas! à cette immense joie déjà se mete nn nuage. Déjà ce be! enfant a pâti. SurcesJQue~siû’aiches.Hestysont remp!ae~ !es rosés, renfant dort encore d’un sommeil tranqu!He mais !amëre ne dort p)uo: JeBenttss’exhaterntOBrestede.teanoste, `

EttetetnpsenmoticœurtMsaatMiourdemaitt, ·

.SoadainJedÈfain)s, Qui ratait et brisait mou se)n.

Après rinsomuie vient ïet’évc. Quand l’enfant va mieux, quand !a jeune famiHe grandit à t’ombre heureuse et calme dfurtifsur ia poésie qui se iait ts-bas dans cet uui vers pari- sien dont les bruits lointains arrivent à peine son orei))e. H s’enquiert de ce qui’se dit dahsie goulfre et de ce que deviennent ses poètes bien-aimés,,quand soudain, o dou- teur et)e apprend que son pbëte a eHe~son ami- son mai- t tre.~Mt inspiration la plus pu~aate après se~ enfans, M. de Lamartine enSn, vient do perdre sa Ëiie dans tes sa- bles de cet Orient qu’il devait étudier do si près pour en parler comme U en aparté plus tard, vous save? de quelles


hauteurs. A cette nGUYetiequcJil!)u est morte, que )f’ poète ramène de son péterinag~ un cercueil granit conxne un grand berceau, la voHàqui se met~ songera NbérBi, à Noémi qui joue encore aux pieds dé sa mère Alors tout d’un coup elle verse des tarmps abondantes, et en même temps des vers tout remplis d’âme et de douleur j Oh! laisse-moi pleurer, mot, mère de <9’tBti!e,

Snr ton trésor perdu, SU)’ton unique fthei i

Un Jour à mon foyer, tu me t’avais promis.

Ta devais t’amener. Diea ne l’a pas penais. Ce jour, J’en ai garde Assis auprès de moi, mon (!)s sur tes genoux, Ta caressais son front et je te partafsd’ette,

Et Ja joie était avec noos.

’Kvi’Jomment M. de Lamartine a du avoif un~’ grande mauenco ~ur ce nob)o et sévère esprit, it est !e premier poets de notre tangue qui ait su parier d’une façon st char- maute de toutes les passions du cœur de l’homme et en même temps de toutes ses croyances; it est le prenjer au: yt su auter avec un si rare bohheHr l’idée de !’in6n: à nos émotions les plus passagères. Qu’il vous parle de Familië etorneUe ou de 1 amour qa’une heure emporte ou du frais paysage qui disparait sous le freid manteau de t’hiver ou de letonequi s’en va jetant ses clartés errantes dans le nuage transparent, toujours H a soin de ramener Dieu pour servir de soutien âses frèles images, ot~ihsi it donna même au simple battement du cœur quelque chose de t’ëternitë l Grand poëte entre tous! Poète mëtanconqtte et chrétien! 1 Poète amoureux, mais amoureux comme la Madeleine nui jette les parfums les plus précieux aux pieds du Christ! Nul ne peut prévoir de nos jours !o fruit de consolation que doivent port~dans les siècles, !M j~~MM poeÏMMM même par les fruits qu’ettes ont portés déjà. Nurneneut dtretout le trésor de charité, de M et d’espérance QM renferme ce grande hvre, même en songeant à toutes ie< consolations dont d abonde pour l’heure présente. Car il est vrai de due que ce touchant poème de la mélancolie et de la rpstgoanon chrétiennes, poème brisé à chaque pa~ où se rencontrent tant de noms iHustres entre tous, Bvron Bo- naparte, Ehtre, a été singutièrement obscurci parles ooëtf)! à la smM, par les douieurs factices, les cmyances à la mode tes rêveries tans but, tes mélancolies sans nom Diem merci, te temps qui emporte tant de choses, Jes mauvais vers phM vite que tout le reste, aura bien vite deMuré les ~<-pIagMta qui obscurciMemt quelque peu ;’éciat or~inat