Arrive enfin l’inévitable déclenchement de sa douleur, et elle étouffe, non sans se trahir un peu, les sanglots qui lui montent à la gorge. Ses fils s’éloignent comme s’ils craignaient de voir les larmes de ses yeux sans prunelles ou d’être touchés.
Passées les longues fatigues de la mauvaise saison.
Au bord du lac Abbitibbi, plusieurs familles de la même tribu, se reposent. Tous les jours Cogomis jette sa ligne à l’eau poissonneuse et vit de sa pêche. Pour des histoires et des légendes, les enfants lui rendent maints services : ils lui trouvent des appâts pour sa ligne ; lui cuisent ses poissons sous la cendre ; lui font, le soir, de la fumée pour la défendre contre les mouches ; et la pauvre vieille, comme les merles auxquels on a crevé les yeux, se surpasse elle-même en son art de raconter, devient géniale et, jusqu’au départ des oiseaux migrateurs, impose à son naïf auditoire des chaînes délicieuses. Quelques femmes charitables recousent ses haillons et la consolent de son infortune. Et pourtant, si l’on pouvait lire sur sa figure en ruine, on lui trouverait une expression de secrète angoisse.
Un pressentiment lugubre l’obsède, lorsqu’elle songe que l’automne rougira bientôt les feuilles, que,