Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, 1823.djvu/362

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bouche comme jadis. Quand Waringue vit ce miracle, son âme ne fut point assez dure pour tourmenter le saint homme, comme il lui avait été enjoint par le tyran. Reconnaissant, au contraire, à de telles preuves le martyr de Dieu, il le prit, et le conduisit à un ermitage à lui appartenant, nommé Fiscommum, où était une congrégation de filles dirigée par Childemarque, servante du Christ. Léger y habita longtemps, et y resta en garde. Sa langue lui rendit son office accoutumé, et il répandit parmi le peuple la semence de sa bonne doctrine ; il se plaçait quelquefois au milieu de la troupe des vierges, et brillait, dit-on, par sa douce éloquence, de manière que tous les gens qui l’entendaient, admirant combien était grande la clémence de Dieu, renonçaient à leurs mauvaises œuvres, se convertissaient, et obtenaient sur-le-champ les heureux fruits de la pénitence. Lorsque, au bout de peu de temps, il eut retrouvé l’usage de ses lèvres, de sa langue et de son palais, comme il avait été offert lui-même en sacrifice, il eut soin d’offrir chaque jour au Seigneur le sacrifice saint ; et comme la lumière spirituelle le remplissait intérieurement, il ne s’inquiétait pas d’être privé de celle des yeux. Il passait les jours et les nuits à louer Dieu, et sortait à peine de l’église pour les nécessités du corps, ou pour prendre quelques aliment et un peu de sommeil.

Après tant de maux, les peuples fidèles rendirent au martyr, comme il convenait, de respectueux hommages ; et comme la lampe ne peut rester cachée sous le boisseau, le Dieu tout-puissant manifesta clairement à tous sa faveur pour Léger, car il commença tout a