Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/227

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maître. » Saisis d’une grande frayeur, ils donnèrent pour se racheter beaucoup de milliers de pièces d’or, et alors il leur fut permis de passer, et ils arrivèrent en Auvergne. C’était alors le printemps ; ils y portèrent des pièces d’airain gravées, qu’ils donnaient pour de l’or, et ceux qui les voyaient ne pouvaient douter que ce ne fût de l’or essayé et éprouvé, tant elles étaient bien colorées par je ne sais quel art. En sorte que beaucoup de gens trompés par cette fraude, donnant de l’or et recevant du cuivre, tombèrent dans la pauvreté. Les Saxons s’étant rendus près du roi Sigebert furent établis dans le lieu d’où ils étaient d’abord sortis.

Sous le règne du roi Sigebert, Jovin [Jovinus] ayant été dépouillé de la dignité de gouverneur de la Provence, Albin fut mis à sa place, ce qui excita entre eux une grande inimitié. Il était arrivé au port de Marseille des vaisseaux venus de par-delà les mers. Les gens de l’archidiacre Vigile dérobèrent, à l’insu de leur maître, soixante-dix vases, vulgairement nommés tonneaux, remplis d’huile et de graisse : le négociant s’apercevant qu’on lui avait dérobé par le vol ce qui lui appartenait, commença à rechercher soigneusement en quel lieu avait été caché le larcin. Comme il s’informait, quelqu’un lui dit que cela avait été fait par les gens de l’archidiacre Vigile. Le bruit en parvint à l’archidiacre qui, s’étant enquis et trouvant la chose vraie, ne voulut pas l’avouer, mais commença à justifier ses gens, en disant : « Il n’y a personne dans ma maison qui osât commettre une telle chose. » L’archidiacre, dis-je, niant donc de cette manière, le négociant eut recours à Albin, intenta une poursuite,