Page:Guizot - Collection des mémoires relatifs à l'histoire de France, Tome 1, 1823.djvu/234

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de la Loire lix. Arrivant à Poitiers, il livra combat au duc Gondebaud. L’armée de Gondebaud ayant pris la fuite, il se fit un grand carnage de ce peuple. Chilpéric brûla aussi la plus grande partie du pays de Tours ; et si les habitants ne s’étaient soumis pour le moment, il aurait entièrement ravagé leurs terres. S’avançant ensuite avec son armée, il envahit, dévasta, désola Limoges, Cahors et toutes ces provinces, brûla les églises, interrompit le service de Dieu, tua les clercs, détruisit les monastères d’hommes, insulta ceux de filles, et ravagea tout. Il y eut en ce temps dans l’Eglise un plus grand gémissement qu’au temps de la persécution de Dioclétien.

Et nous nous émerveillons de ce que tant de maux se sont précipités sur eux ! mais jetons les yeux sur ce qu’ont fait leurs pères, et voyons ce qu’ils font. Ceux-là, sur les prédications des prêtres, avaient quitté les temples pour les églises ; ceux-ci, chaque jour, livrent les églises au pillage ; ceux-là écoutaient, révéraient de tout leur cœur les prêtres du Seigneur ; ceux-ci non seulement ne les écoutent pas, mais ils les persécutent ; ceux-là enrichissaient les églises et les monastères ; ceux-ci les bouleversent et les détruisent, que dirai-je ici du monastère de la Latte lx, qui possédait des reliques de saint Martin ? Une troupe d’ennemis étant arrivée, et se disposant à passer la rivière proche du monastère, afin de le dépouiller, les moines les appelèrent, et leur dirent : « Gardez-vous, ô Barbares, gardez-vous de passer le fleuve, car ce monastère appartient au bienheureux Martin.» Plusieurs d’entre eux, entendant ces paroles, furent émus de la crainte de Dieu, et se retirèrent ; mais une