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Page:Guizot - Encyclopédie progressive.djvu/272

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des sociétés, il nous importerait assez peu de savoir ce que nos prédécesseurs ont rêvé sur ce sujet, et de décrire cette suite de faux pas qui ont toujours retardé la marche de l’homme dans la recherche de la vérité. Les erreurs ne sont pas ce qu’il s’agit d’apprendre, mais ce qu’il faudrait oublier.

Cependant toute espèce d’histoire est en droit de flatter la curiosité ; elle apprend à connaître les procédés de l’esprit humain ; une erreur dévoilée empêche qu’on y tombe de nouveau ; sa discussion dégage et consolide les fondemens d’une vérité ; et enfin, quand les principes d’une science sont encore à quelques égards débattus, son histoire admet des controverses qui répandent du jour sur les points contestés et même sur l’ensemble de la science. Je regrette donc que les limites que je me suis prescrites en ce moment, m’interdisent des développemens qui pourraient n’être pas sans intérêt et que je réserverai pour un grand ouvrage dont je m’occupe.

Les anciens paraissent avoir peu réfléchi sur l’ensemble des connaissances qui forment aujourd’hui le domaine de l’économie politique. Les deux seules nations qui nous ont transmis ce qu’ils savaient étaient deux peuples guerriers, obligés d’avoir sans cesse les armes à la main, d’abord pour se défendre contre les attaques de leurs voisins, puis ensuite pour envahir des états plus éloignés. Ils se composaient d’une caste de nobles qu’on appelait des citoyens, et d’une caste de travailleurs qu’on appelait des esclaves. Leurs institutions étaient plutôt militaires que civiles. Elles avaient pour objet des hiérarchies de pouvoir, des partages de butin, des cérémonies, des évolutions, plutôt que la protection des libres mouvemens de l’homme, le développement de son intelligence et les arts de la paix. Leur subsistance, leurs accumulations étaient fondées sur la conquête et la déprédation. Les capitaux servaient au luxe plutôt qu’à la production, et le travail ne donnait de droits qu’au mé-