chaque jour vous dites sans scrupule : « Faites le bien, évitez le mal, aimez Dieu, nous avons une âme immortelle » sans savoir ce que c’est que le bien et le mal, sans jamais avoir vu Dieu, sans savoir s’il existe, et vous en rapportant à la foi d’un vieux prêtre radoteur qui, comme vous, n’en savait rien ; pour l’âme, vous en êtes sûr, convaincu, persuadé, vous donneriez votre sang pour elle, et qui vous l’a démontrée ? Est-ce que vous sentez votre âme, comme votre estomac qui crie : j’ai faim, comme vos yeux qui, fatigués, demandent à être fermés, comme votre ventre qui vous chante : accouve-toi ou bien je vais faire quelque saleté ? Dis, ton âme a-t-elle faim, dort-elle, marche-t-elle, la sens-tu en toi ?
Questions embarrassantes ! je n’y avais jamais songé.
Embarrassé pour si peu de chose ! Cela est clair comme le jour, car tu dépeins à tout le monde la nature de cette âme, ses besoins, ses douleurs, ses destinées, ses châtiments ; et tu te sens embarrassé pour si peu de choses ! Comment ? Mon ami, je te croyais plus d’intelligence pour un homme du Seigneur. Heureux homme ! Tu es donc sans conscience, puisque tu enseignes et démontres des choses que tu ne sais pas.
Heureuse avec un pareil homme ?
Mon dieu, oui, il le faut bien.
Oui, il faut bien se résigner, n’est-ce pas ? mais pour cela le cœur est lourd, tout en faisant le ménage