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Étude sur la convention de Genève pour l’amélioration du sort des militaires blessés dans les armées en campagne, par Gustave Moynier, président de la Société génevoise d’utilité publique et du Comité international de secours pour les militaires blessés, etc. — 1 volume in-12. Librairie de Joël-Cherbuliez.

Tant qu’il y aura des peuples assez ignorants ou assez aveugles pour se livrer corps et biens aux volontés capricieuses d’un seul, il y aura des causes permanentes de luttes intestines et de guerres extérieures : d’un côté, de légitimes résistances contre l’oppression ; de l’autre, des conflits d’amour-propre entre souverains, des revendications, des disputes sur des délimitations de frontières naturelles ou conventionnelles. Dans tous les temps, les rois ont armé les peuples, les ont lancés les uns sur les autres pour des motifs plus ou moins futiles sous couleur d’intérêt national. Les progrès de la civilisation, l’adoucissement des mœurs ont pu, sinon prévenir, au moins mitiger les désastres de la guerre, et de louables tentatives ont été faites de nos jours pour y arriver. La convention de Genève, si imparfaite encore dans ses détails, est toutefois dans son ensemble un généreux effort pour introduire des procédés humains dans ce qu’il y a de moins humain, la guerre.

Singulière anomalie ! À une époque comme la nôtre, où le droit tend à se substituer à la force, la guerre est devenue plus que jamais l’expression de la raison du plus fort, grâce aux perfectionnements apportés dans les instruments de meurtre et de destruction, qui renversent de loin des masses d’hommes et de murailles, et contre lesquels le courage le plus héroïque vient se briser, impuissant. En face de ces résultats désastreux, il s’est produit une réaction en vue de les atténuer. On s’est préoccupé du sort des victimes et l’on a cherché à restreindre en leur faveur les droits des belligérants, à y opposer autant que possible le droit naturel, c’est-à-dire le respect de la personne humaine. À cet effet, les puissances européennes les plus civilisées se sont concertées dans le but de diminuer les maux de la guerre. De là, les conventions internationales de 1856, de 1864 et de 1868.