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Page:Gustave Toudouze - Péri en mer, 1905.pdf/203

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maison. Le malheureux n’a que le temps de rentrer chez lui pour donner un dernier adieu à celle qui va le quitter, et pour achever de s’habiller, afin de l’accompagner à la demeure définitive, pour la rendre à la terre qui la réclame.

Tout est prêt ; la brume ensevelit la pointe de Pen-Tir, enveloppe les assistants, flotte en buée neigeuse au-dessus du cercueil caché sous le drap noir, se glisse entre les groupes, se répand en fumée autour des longues mantes noires et plissées à plis serrés contre les épaules, les mantes à capuchon qui tombant jusqu’aux pieds, formant le costume particulier des veuves et des femmes se rendant aux enterrements, à Camaret.

Les chants ont repris, nourris, sonores, n’ayant plus l’essoufflement de la montée, et sont accompagnés par la basse grondeuse de la mer hurlant dans les roches, par les longs cris pleureurs des Tas-de-Pois.

Avec ce ciel gris, ardoisé, que des trouées ont permis d’entrevoir, avec ce sombre Océan, tout le pays prend un caractère spécial, sa vraie physionomie bretonne, où se mélange toujours du mystère, le vague des teintes grises, des temps pluvieux, des brumes, derrière lesquels les Druides abritaient autrefois la Religion, les voix secrètes jaillies du sein des cavernes ténébreuses, du milieu des granitiques écueils sacrés, à travers le bris grondant des vagues dans les cavités