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phore, bien à l’abri et pouvant manœuvrer à l’aise sans craindre les rafales, il pointa son verre dans la direction.

Mais, à chaque instant, le fragile bateau plongeait, trois ris pris dans l’unique voile qu’il avait osé conserver, et des tourbillons d’écume l’enveloppaient.

— Est-ce de Camaret, de Douarnenez ?

Il attendait une éclaircie qui lui permit de s’assurer, de reconnaître la forme de la coque, la disposition des mâts ou peut-être même le numéro.

Le ciel s’assombrissait encore plus.

— Peut-être de Morgat ? fit-il.

Tout à coup, comme une divination :

— C’est Larvor, j’en jurerais !…

Presque aussitôt une réflexion lui venait, nette, implacable, tranchante comme une lame acérée plongée en plein cœur :

— Alors il est perdu !… À moins qu’il ne s’échoue au Veryhacʼh, s’il est encore temps ?

L’œil au verre grossissant, la prunelle piquée de larmes, tellement il s’appliquait à voir, il suivit comme il put la marche de la malheureuse barque.

Par moments on ne l’apercevait plus, et l’on aurait pu la croire disparue, engloutie brusquement ; puis l’aile brune pointait au-dessus d’une vague, semblait se débattre une minute pour disparaître de nouveau, comme un oiseau jouant dans la tempête.