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Page:Gustave Toudouze - Péri en mer, 1905.pdf/281

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— Je ne l’ai jamais oublié, moi !… Je ne demande qu’à l’être toujours, tu le sais bien.

Guivarc’h semblait gêné, les paroles sortaient péniblement de sa gorge, serrée par l’angoisse, par une souffrance intense :

— Tu as sauvé Yvonne !… Je ne t’ai pas encore remercié !… Elle te doit… nous te devons la vie, tous les deux !… Car moi… moi aussi !…

Sa voix trembla :

— Je ne veux pas que ce soit pour ton malheur !… Tu es meilleur que moi !… Là-bas, on m’a perdu, on m’a rendu mauvais ; et puis, ici, mon retour… personne, plus personne !…

Corentin, très embarrassé, roulait et déroulait une ligne sur ses doigts, tandis que cet échange de paroles avait lieu entre eux à voix basse, il dit :

— Et moi, Hervé ?… Ton ami… Tu aurais dû penser !…

L’autre leva la main d’un geste désespéré, balbutiant :

— Elle !… Ah ! pourquoi ?…

Il n’acheva pas, se dominant :

— Mariannik sera ta femme ; tu en es plus digne qu’un mauvais gars de ma sorte !… J’étais fou !… Est-ce qu’avec moi, avec le Revenant, elle pouvait ?… Ah ! ah ! ah ! Quand on a eu mes aventures, mon existence ? Si on savait ?… Ah ! ah ! ah !…

Un rire sinistre, où grelottait comme un secret sanglot, coupa net sa phrase sans qu’il achevât