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Page:Gustave Toudouze - Péri en mer, 1905.pdf/49

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Partout, toujours, on la retrouvait ainsi. Roulée de la lande à la grève, des sables fins de Pen-hat aux roches cyclopéennes de Pen-Tir, du village à la plage, elle allait, sans cesse par les chemins, par les sentiers, par les rochers, égrenant au vent sa folie, jetant autour d’elle sa chanson tantôt triste, tantôt gaie, froissant du pied les herbes des grandes landes sauvages, d’où montait un arôme délicieux, errant à travers les chardons bleus de ces dunes, semblables à des vagues bousculées jusque-là par le souffle de l’Atlantique et soudain pétrifiées.

En elle semblait s’être réfugiée l’âme superstitieuse de la vieille Bretagne, l’antique Armorique avec ses légendes, ses contes, ses croyances fantastiques. De ses lèvres coulaient, comme d’une mystérieuse source intarissable, les récits étranges, les vieux chants de bravoure ou d’amour, qui prenaient une allure plus frémissante, jaillissant de ses lèvres inconscientes, tandis que ses yeux fixes luisaient d’un éclat de cauchemar.

Lorsqu’il fut près de six heures, au moment même où tant de signaux inquiétants se balancèrent au mât du sémaphore, portant l’inquiétude à Camaret, voilà que la mer se mit à commencer à descendre et cessa de lécher la base des dunes de ses vagues les plus avancées.

Une première ligne d’écumes sèches, de varechs, dessina comme un feston géant tout le long de